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75 ans de la libération du camp d’Auschwitz

By 22 janvier 2020 janvier 27th, 2020 No Comments

 

C’était il y a 75 ans… à peine trois fois 25 ans…Le monde entier découvrait l’horreur absolue que jusque-là, malgré les avertissements,  il n’avait pas voulu voir…

 

Déserté par les Nazis sous l’avancée des troupes soviétiques, le Camp d’Auschwitz-Birkenau laisse apparaître au grand jour les traces de l’innommable furie d’hommes assoiffés de pouvoir et de haine. Dans les travées du camp de concentration et d’extermination, tout rappelle la mort, la peur et la soumission. Chambres à gaz, fours crématoires, barbelés électrifiés, et quelques zombies d’os et de peau, miraculés qui ont échappés à l’indicible. 

 

Ici un million trois cent mille innocents ont été exécutés car ils étaient juifs, Roms, Tziganes, homosexuels, prisonniers politiques. La cadence infernale de cette honteuse décadence a fait jusqu’à cinq mille victimes par jour quand la « solution finale » s’est accélérée ! Gigantesque et effroyable usine de la mort pour des enfants, des femmes, des hommes déportés de toute l’Europe par le régime Nazi et ses collaborateurs complices, sous prétexte qu’ils ne répondaient pas aux standards de la race aryenne décrétés par les Nazis. 25 mille furent arrêtés et déportés depuis la Belgique. Seuls cinq pour cent en sont revenus.  

 

75 ans plus tard, il y a une semaine, dans le vent froid d’Auschwitz-Birkenau, j’y ai vu de mes yeux effarés les traces de cette ignominie. Les mêmes Blocks, les mêmes barbelés, les mêmes rails de train, les wagons à bestiaux figés dans l’effroi d’un endroit qui porte à jamais la douleur d’une complicité coupable. 

Je marche dans un cimetière à ciel ouvert où rien ni personne ne peut reposer en paix. S’y échappe encore l’écho lointain de la complainte de ceux qui sont tombés sous les coups de l’infamie. 

 

D’un bloc à l’autre, les preuves s’étalent, comme autant de gifles au coeur et à l’âme : des milliers de chaussures de toutes tailles, autant de paires de lunettes, de valises marquées du nom des déportés forcés, deux Tonnes de pelotes de cheveux, rasés des crânes des victimes et qui servaient à l’industrie allemande du textile… Tout ici transpire, pue et hurle l’insensée barbarie. Celle-ci n’est pas tombée du ciel… Elle a été préparée, orchestrée dès les années 30 par la montée du Régime National-Socialiste en Allemagne et l’élection de son chef. Car oui, le barbare en chef a bel et bien été élu par son peuple, une partie à tout le moins. Préparée, orchestrée, acceptée ou silencieusement subie par ceux qui, par milliers, ont eu la lâcheté de ne pas s’y opposer. En Allemagne, d’abord, dans toute l’Europe ensuite. Au total, plus de six millions de juifs ont payé de leur vie cette folie et cette faillite morale collectives. 

 

Dans un des blocs du camp d’Auschwitz, cette citation de George Santayana : « Ceux qui ne souviennent pas du passé sont condamnés à ce qu’il se répète ». 

 

Pensez au Rwanda, à Srebrenica. Pensez-y quand vous êtes confronté  à la différence, à l’intolérance, au rejet d’autrui… Pensez-y tant que vous pouvez librement vous exprimer, vous opposer, vous prononcer dans les urnes. Attribuer sa voix aux partis de l’extrême, c’est le début d’un dangereux chemin qui peut mener vers de sombres lendemains. Un jour ou l’autre, sans qu’on y prenne garde, sans qu’on ne l’ait voulu, par faiblesse, lâcheté ou manque de vigilance, nous pouvons tous basculer du côté des bourreaux comme nous pouvons tous devenir le juif, le Tutsi, le migrant ou le pestiféré d’autrui.

 

Il y a une semaine dans le vent froid d’Auschwitz, j’avais à ma droite l’écrivain Juif Marek Halter et à ma gauche, Hassen Chalgoumi, l’imam de Drancy. Deux hommes, et un symbole fort, réunis dans la même tristesse, la même sidération, la même honte du rejet de l’autre. Portée par ce vent d’espoir et de liberté, une bourrasque m’a soudain glacé le sang. Je me suis souvenu qu’en 2020, à Paris, pour porter un message de paix et de tolérance, ce même Imam de Drancy vit en permanence  sous la protection de cinq policiers. Sa famille a été exfiltrée dans un endroit tenu secret. Je me suis rappelé qu’en 2020, en France comme en Belgique, l’idéologie totalitaire de l’islamofascisme de Daesh rampe encore dans certains de nos quartiers prenant dans ses filets des hommes et femmes de toutes origines et de toutes confessions qui n’aspirent qu’à vivre en paix. Je me suis aussi souvenu que, comme dans les années 30, chez nous comme ailleurs en Europe, l’extrême droite et l’extrême gauche, insidieusement, progressent… 

 

75 ans, trois quarts de siècle, c’est loin et ce n’est rien à la fois… 

75 ans, c’est hier, et si l’on ne fait rien cela pourrait être demain.

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