Ce jeudi, à la Chambre, j’interrogeais la Première ministre sur la quatrième phase du déconfinement. Voici l’intégralité de notre échange :
Question
Madame la première ministre, la situation sanitaire semble s’améliorer dans notre pays et nous nous en réjouissons bien entendu tous. C’est pourquoi il était important d’adresser un message clair quant à la prochaine phase de déconfinement, la quatrième déjà, qui débutera le 1er juillet prochain.
Comme vous l’avez mentionné hier, malgré les derniers chiffres encourageants, nous devons rester vigilants car nous ne sommes pas à l’abri d’un nouveau rebond de l’épidémie et le virus n’est pas inoffensif. Nous devons continuer de lutter activement contre sa propagation.
Il est bien entendu difficile de prédire avec exactitude la manière dont la situation sanitaire va évoluer au cours des prochaines semaines et les réponses ne sont jamais simples car elles engendrent malheureusement toujours des conséquences sur notre vie quotidienne.
Les mesures qui ont été communiquées hier nous permettront de profiter encore un peu plus de la vie après une période si éprouvante – il faut bien le dire – durant laquelle nous avons toutes et tous fourni de nombreux efforts pour lutter contre ce virus. Même si la prudence est de mise, il est important que nous puissions, petit à petit, à nouveau jouir de notre liberté que nous connaissions avant l’apparition de l’épidémie.
La majorité des activités qui n’étaient toujours pas permises jusqu’à maintenant, madame la première ministre, le seront donc à nouveau dans les prochains jours et nous sommes persuadés que les nombreux protocoles établis permettront de lutter contre une nouvelle résurgence du virus et ainsi de participer à éviter une éventuelle nouvelle vague.
Néanmoins, les protocoles seuls ne suffiront pas pour lutter contre une nouvelle propagation et nous devons continuer, chacun et chacune, à être prudents. Les règles à suivre sont de moins en moins contraignantes et c’est tant mieux mais il faut impérativement continuer de les suivre de manière pragmatique et scrupuleuse.
Dans le cadre des nouvelles mesures de déconfinement progressif annoncées hier, madame la première ministre, pourriez-vous nous donner plus d’informations concernant les protocoles prévus en ce qui concerne les événements de masse et plus spécifiquement les manifestations? Vous avez dit que le port du masque était fortement recommandé mais pas obligatoire, notamment dans les commerces. Pourrait-il le devenir dans le courant des prochaines semaines en cas de détérioration de la situation?
Réponse
Grâce à l’évolution positive, la Belgique entame le 1er juillet 2020 la phase 4 et les assouplissements qui en découlent. Un pas en arrière n’est cependant jamais exclu. Les rassemblements des dernières semaines compromettent les efforts consentis au cours des derniers mois. Les personnes concernées mettent en danger non seulement leur propre santé, mais aussi celle de leurs proches. Ces comportements suscitent de surcroît la colère et la frustration dans le chef des personnes qui sont au front depuis le début de la crise et dans le chef de celles qui observent scrupuleusement les directives. J’invite chacun à faire preuve de civisme, de responsabilité et de solidarité envers les plus vulnérables. Le coronavirus fait encore chaque jour de nouvelles victimes et le danger n’a donc pas disparu. La police a la tâche importante de tenter de prévenir de tels rassemblements et de verbaliser les personnes concernées.
En tout état de cause, ce n’est pas une situation facile.
À ceux qui nous expliquent ici que ces rassemblements sont la conséquence de mesures qui ne sont pas claires, je demande d’expliquer cela à tous ceux qui respectent les règles sans difficulté! Franchement, c’est un petit pas trop loin! Si vous avez besoin de clarté, je vais vous rappeler que ce genre de rassemblement est non seulement interdit mais aussi dangereux! On ne pourra dès lors plus dire que ce n’est pas clair!
Les nouveaux foyers de contagion apparus dans certains pays doivent nous inciter à la plus grande prudence. Si les interdictions sont limitées, elles doivent être scrupuleusement respectées. Les gestes barrière restent par ailleurs indispensables, dans l’intérêt de tous. Comme c’est le cas depuis le début de la crise, le suivi épidémiologique continuera à nous guider dans le processus de déconfinement. La santé avant tout! Si les tendances demeurent positives, de nouvelles interdictions pourront être levées.
Si, malheureusement, le virus venait à reprendre de la vigueur, nous devrons alors renforcer certaines mesures de sécurité. Dans ce cas, le port du masque pourrait être rendu obligatoire dans les espaces publics très fréquentés. C’est exactement ce que préconisent les experts du GEES dans leur rapport. Vous ne l’avez pas encore reçu, je vais vous en citer un passage: “In case of sustained increasing viral transmission levels for an extended period of time and/or indoor activities with larger audiences, the compulsory use of masks in crowds and indoor setting is needed.”
Le rapport du GEES n’appelle donc pas à l’obligation du port du masque pour le moment. Vous le constaterez vous-même à la lecture du rapport, qui sera mis en ligne dès lundi. Le CNS base toujours son avis sur les rapports remis par le GEES. C’est vrai qu’il décide et qu’il tranche mais il base d’abord son avis sur les rapports. Ces rapports sont validés par l’ensemble des membres du GEES, sans exception, donc y compris ceux qui expriment une opinion différente dans des tweets ou dans des interviews. C’est un choix et surtout une liberté individuelle, donc ce n’est pas un reproche. C’est une simple constatation.
Il importe de préciser que nous souhaitons évidemment identifier un seuil épidémiologique à partir duquel le port du masque serait rendu obligatoire dans l’espace public très fréquenté. La seule prise en compte du taux de propagation du virus (R0) ne peut être, à elle seule, retenue comme révélatrice de la situation sanitaire, a fortiori quand les chiffres d’hospitalisation sont très bas. Nous souhaitons agir, non quand c’est trop tard, comme certains l’ont prétendu, mais lorsque c’est nécessaire – et donc, sans attendre la deuxième vague. Notre objectif est bien d’anticiper celle-ci et de l’éviter.
Il est aussi question – et vous l’avez entendu dans ce que je vous ai dit du rapport du GEES – d’identifier les circonstances particulières dans lesquelles le port du masque pourrait également être rendu obligatoire, comme lors de très grands rassemblements. Le Conseil national de sécurité et le groupe d’experts partagent cette analyse et cette volonté. Une réflexion est en cours.
En attendant, je rappelle que le port du masque est obligatoire dans certaines circonstances et reste toujours fortement recommandé. Cette forte recommandation a, jusqu’à présent, été bien suivie par la population. Les Belges et tous ceux qui vivent ici ont, pour le moment, correctement observé les recommandations pour que l’on constate que la courbe de transmission du virus diminue jour après jour. Comme le disait M. Verherstraeten à l’instant, qu’ils profitent positivement de ce que leur comportement exemplaire peut leur apporter aujourd’hui, c’est-à-dire un peu plus de liberté, certes, mais toujours dans le respect des mesures sanitaires.
S’agissant des événements privés, le nombre maximal de personnes présentes est de cinquante. Par contre, pour les événements à l’intérieur avec public, il s’élève à 200 et à 400 pour les événements en extérieur. Il s’agit d’un public qui est souvent assis dans des infrastructures prévues à cet effet et avec des protocoles qui doivent être définis avant même l’ouverture. Ces protocoles vont permettre de gérer non seulement la manière dont les uns et les autres s’assoient, en bulles ou séparés en fonction des possibilités, mais également les arrivées et les sorties, l’utilisation des sanitaires – toute une série de choses beaucoup plus difficiles à réaliser dans la sphère privée.
La question de l’heure de fermeture des bars et des restaurants a aussi été évoquée lors du Conseil national de sécurité. Après avoir entendu les acteurs de terrain et en concertation avec les experts du GEES, nous avons décidé de ne pas modifier l’heure de fermeture telle qu’actuellement appliquée, à savoir une heure du matin, non seulement parce que la règle est claire – il n’y a donc aucune raison de la modifier – mais, surtout, parce que prolonger l’heure d’ouverture des bars et des restaurants n’apporterait pas de réponse aux problèmes posés. Telle est la décision du Conseil national de sécurité où, je le rappelle, ne siègent pas seulement des responsables politiques mais aussi des responsables de la police et d’autres services de sécurité du pays. Ceux-ci estiment que retarder la fermeture pourrait entraîner un simple déplacement des difficultés potentielles plus tard dans la nuit. La volonté des forces de l’ordre est de travailler de la manière la plus préventive possible par le biais d’une présence policière dans les endroits concernés.
Il est vrai qu’en dépit de l’ouverture des derniers secteurs, certains restent toujours fermés. Les activités liées à la vie nocturne et les événements de masse restent interdits vu le risque toujours encouru en termes épidémiologiques. Nous sommes conscients que la situation est particulièrement compliquée pour ces secteurs. C’est la raison pour laquelle j’ai rappelé hier qu’il fallait continuer à les soutenir que ce soit au niveau fédéral, comme on le fait de manière transversale avec toute une série de mesures ou de manière plus ponctuelle, ou que ce soit au niveau des Régions qui ont une compétence importante en la matière.
En ce qui concerne le secteur de la culture, je rappelle, si besoin est, que c’est bien le niveau communautaire qui est compétent. Néanmoins, s’agissant des aspects limités qui relèvent de la compétence du fédéral, nous ne sommes pas restés inactifs. Tout d’abord, les artistes comme les acteurs d’autres secteurs (le monde de la nuit, par exemple) bénéficient des mesures générales prises dans le cadre du plan de protection sociale et économique comme le chômage pour force majeure, le droit passerelle pour les indépendants et le report de certaines charges. Ensuite, au vu du redémarrage très progressif de leurs activités, des mesures plus spécifiques leur ont été destinées. C’est ainsi que, dans le troisième volet, nous avons décidé de mettre en place un chèque consommation de 300 euros visant notamment, mais pas uniquement, l’achat de biens et de services dans des secteurs comme la culture. Ce chèque est déductible à 100 % et défiscalisé.
En parallèle, ce Parlement a effectivement pris la main sur certaines questions qui avaient pourtant été débattues lors de nos réunions du superkern, mais tous les partis présents ont préféré que le Parlement garde la main, ce que nous avons bien évidemment accepté, car vous restez maîtres de vos travaux. Vous me permettrez dès lors de ne pas faire de commentaires à cet égard.
Il reste, en effet, à aborder certaines questions plus structurelles telles que la mise en place d’un véritable statut d’artiste. Cette question a déjà fait l’objet de discussions lors d’une Conférence interministérielle Culture ainsi que d’une réunion que j’ai moi-même organisée le 25 mai dernier avec des représentants du secteur et tous les ministres concernés. Une nouvelle Conférence interministérielle est prévue le 14 juillet prochain, et je ne doute pas que nous reviendrons sur le statut des artistes à ce moment-là.
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